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Comment vivre ensemble aujourd’hui ? Comment habiter, travailler, se cultiver ou bricoler ensemble ? À travers notre pays et en Europe, de multiples endroits proposent d’autres manières de faire société. On les appelle les 'tiers-lieux'. Découverte de cette nouvelle approche avec Laure De Hesselle, journaliste à Imagine, Pierre-Alexandre Klein de L’Arbre qui Pousse – Tiers-lieu d’émergence et de “3/3” et Xavier Marichal de la coopérative Quatre quarts, qui étaient les invités de Tendances Première.

Un lieu rassembleur et une vision collective pour échanger et entreprendre ensemble

Comme le définit Laure De Hesselle du magazine Imagine, l’idée générale d’un Tiers-Lieu est un endroit dans lequel on peut faire toutes une série de choses : manger, se former, participer à des ateliers, découvrir des évènements culturels… Idéalement, il y a aussi 'derrière' des questions de gouvernance.

L’Arbre qui Pousse, situé dans une ancienne ferme en carré sur la commune d’Ottignies-Louvain-la-Neuve, est né en 2018 comme le raconte Pierre-Alexandre Klein : "C’est un projet qui s’est réalisé en 2019 où l’envie des fondateurs était de repenser les rapports entre humains avec la question de 'comment habiter la planète Terre au 21e siècle ?' On a réuni des personnes autour de six pétales, six piliers de notre projet : l’art et la culture, la ferme productive, l’habitat groupé, un centre de transmission, un campus, une ruche d’entrepreneurs […] Je dirais qu’un tiers lieu est une structure polymorphe avec différentes fonctions". Il précise "Au plus une vision sera claire, au plus des individus vont pouvoir rejoindre, fédérer et agir ensemble".

La coopérative Quatre Quarts a créé un tiers Lieu dans l’ancienne gare de Court-Saint-Etienne prêtée par la SNCB, actuellement pour un bail de 8 ans. Xavier Marichal, un des fondateurs du projet, développe : "En plus du restaurant, Quatre Quarts recueille les propositions de citoyens et d’associations et propose des concerts, ateliers, conférences, temps de partage et d’échange, afin que chacun puisse s’approprier le lieu. C’est un espace pour se trouver et se retrouver avec d’autres et échanger. La demande est en hausse ainsi que l’augmentation des projets collectifs en ce temps d’après-confinements pour pouvoir partager des intérêts communs".

Pierre-Alexandre Klein a en outre créé Trois-Tiers, un lieu facilitateur de nouveaux lieux d’émergence : "Les humains aujourd’hui sont en quête de sens dans tout ce qui nous arrive. On parle de ces tiers lieux comme des laboratoires d’expérimentation sociale afin de pouvoir créer du lien entre les humains. Cette dynamique citoyenne fait que les gens parlent, créent et innovent ensemble. C’est un magnifique creuset social et environnemental. On est dans des déséquilibres écosystémiques importants et sans être catastrophiste, on doit repenser nos façons de manger, de consommer, de faire de la recherche, d’entreprendre. On accueille autant des voisins des alentours que des demandeurs d’asile avec la Croix rouge, que des chercheurs de la KUL et de l’UCL qui viennent travailler ensemble. On a des savoirs qui sont le fruit de nos expériences, que l’on aime transmettre".

© Getty Images

Des espaces d’innovation et de résilience humaine et territoriale

Pour Xavier Marichal de Quatre Quarts, le défi permanent est celui de l’équilibre financier : "L’Horeca est le poumon économique du lieu. De plus, c’est une réinvention permanente pour inventer ce qui marche, ce qui plaît et ce qui fait que le public a envie de s’approprier le lieu […] Le foisonnement des projets avec une gouvernance horizontale qu’est la sociocratie nous permet d’être résilients et de faire évoluer le projet".

Pierre Alexandre Klein ajoute : "Notre but avec Les Trois-Tiers est d’aider des gens à lancer leurs lieux, à créer des collectifs sur les territoires avec leur vision propre. Il y a des thématiques communes : quel leadership, quelle gouvernance partagée, quelle raison d’être, comment on aménage des terres, comment on gère l’urbanisme… Nous sommes en quête de renouveau perpétuel en connectant ces Tiers-Lieux entre eux".

Laure De Hesselle signale : "Une des choses que j’ai remarquées dans les différents projets est l’aspect du soin. Ce sont des lieux de soins. Il y a beaucoup de bénévoles et de gens qui y passent qui m’ont témoigné avoir vécu un burn-out. Ce sont des endroits où règne une bienveillance particulière qui fait que ces lieux sont aussi précieux".

Une émergence de Tiers-lieux en Wallonie ?

En Wallonie, le cabinet de la ministre de l’environnement Céline Tellier a soutenu 23 projets en décembre 2022 dont 50% sont publiques ou parapubliques. "Je voudrais signaler les Comptoirs des Ressources créatives partout en Wallonie qui ont créé des dizaines de tiers-lieux à Mons, à Liège. C’est extrêmement vivant" ajoute Pierre-Alexandre Klein. Pour lui, avec les sécheresses et les inondations, il y a de vrais enjeux qui peuvent s’expérimenter dans ces lieux-là avec le secteur public qui a son rôle à jouer. "Ce sont des projets du secteur associatif donc ils sont précaires. Pour la première fois, je trouve qu’il y a une vraie symbiose entre le secteur public et des citoyens entrepreneurs qui mettent ses projets sur pied" se réjouit-il.

Suite à un appel à projets fin de l’année dernière, une cinquantaine de projets ont déjà été établis ou sont en voie de création : "Il y a une vraie dynamique, même si nous représentons encore une petite niche due à la complexité de mener des projets collectifs. On va sensibiliser le secteur public et les administrations car il y a tellement d’obstacles au niveau urbanistique et de mobilité qui sont liés à ces lieux. Les 30 et 31 mai 2024, on va organiser 'un Festival des Lieux Résilients' où on va accompagner des arrondissements et des communes pour comprendre l’intérêt de ce genre de lieu".